Vendre une œuvre de Ruhlmann

Publié le 15 décembre 2021

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Ruhlmann, un ensemblier sensible au raffinement

Jacques-Emile Ruhlmann (1879- 1933) joua un rôle prépondérant dans la montée de la profession d’ensemblier à Paris dans les années 20. Il bénéficiait d’un instinct d’architecte qu’il avait développé auprès de son père qui tenait un commerce de peinture, miroiterie et verrerie.

Il pensa et créa un mobilier de haute qualité et réhabilita la notion de luxe dans une société conservatrice en mal de modernité. Ses meubles combinent l’héritage du XVIIIe siècle ainsi que la technique moderne et ses raffinements esthétiques. 

Il élabora des meubles personnalisés, souvent interprétés comme ne s’adressant qu’à une tranche aisée de la population. Aux controverses que cet élitisme suscitèrent, il confia en 1925  : “Jusqu’à présent je n’ai pas songé au meuble de série. J’estime qu’il faut rallier d’abord à l’esprit moderne une élite qui demeure l’arbitre du goût, sans toutefois prétendre qu’il ne faut penser qu’à elle.”

Du dessin à la décoration

Sa qualité de créateur est visible dans ses dessins qui sont nerveux, en mouvement. Ils révèlent une délicate fragilité, une tension qui sera apaisée à la réalisation de ses meubles. Ses dessins témoignent que, dans ses intérieurs, le meuble tient la place centrale. Il est souvent installé en estrade et l’agencement tout autour le met en scène. Ruhlmann a en effet une vision globale de la décoration, il s’intéresse aussi aux tapisseries, à l’éclairage, au revêtement des sols, à la ferronnerie.

Beaucoup d’ensembles de Ruhlmann ont une disposition symétrique, depuis les armoires jusqu’aux appliques murales, ce qui apporte une atmosphère classique, chic et sobre à ses compositions. En 1923, lors de l’exposition du Salon des Artistes Décorateurs, Guillaume Janneau commente : “M. Ruhlmann aime la sobriété architecturale. Il compose un meuble comme il ferait un monument. De là, peut-être, cette grandeur propre à son talent, et cette élégance qui n’appartient pas seulement à la distinction de son goût”.

Les lignes sinueuses de ses croquis devinrent des motifs très actuels pour des papiers peints, des tissus, des tapis. Elles sont un motif récurrent dans ses ensembles comme les cercles entrecroisés dans la marqueterie de son mobilier.

Un goût personnel du décor

Ruhlmann est peu porté sur l’ornementation, il est assez critique quant à l’inspiration naturaliste de l’École de Nancy. Au début de sa carrière pourtant il a parfois paré ses meubles d’un décor figuratif, sculpté ou marqueté. L’argentier demi-ventre, dans l’une de ses versions, est orné d’une corbeille de fleurs, style Art-Déco. L’un d’entre eux s’est vendu 36 000 euros en 2020, mais les prix peuvent monter beaucoup plus haut.

Après 1920, il remplace le motif sculpté par des motifs répétitifs comme des nervures, des cannelures ou des barettes juxtaposées, donnant ainsi du rythme à un meuble d’apparat comme le meuble à fards ou le chiffonnier cannelé.

Ruhlmann intègre directement le décor au placage dans le façonnement de son mobilier. Les fibres sont généralement de teintes différentes et les loupes et autres effets de croissance du bois façonnent une décoration naturelle rendant chaque meuble unique.

Nous pouvons ainsi retrouver du mobilier en loupe de noyer aux grands motifs concentriques, plaqués en damiers juxtaposés, mais aussi en bois de violette ciselé en minces baguettes horizontales ou bien en lamelles d’ébène de macassar recomposant le dessin continu du bois tranché.

Ruhlmann utilise aussi parfois des touches d’ivoire qui introduisent de l’éclat dans ses motifs. Son mobilier est pourvu de détails subtils  qui allèguent le qualificatif de” précieux” à ses ouvrages réalisés avec finesse.

Cote des œuvres de Ruhlmann

Le mobilier

Les prix démarrent autour de 1 000 euros pour certains fauteuils. Ainsi une paire de fauteuils Gonse en cuir s’est vendue 1 990 euros en 2020, et un fauteuil en acajou édité par Alfred de Porteneuve a trouvé acquéreur pour 1300 euros. 

Une console en bois a été attribuée 1 747 euros en 2017

Une table liseuse en merisier s’est vendue 2000 euros en 2019.

Une petite bibliothèque en chêne a trouvé acquéreur pour 2 845 euros le mois dernier.

Le record des ventes est une chaise longue “Aux Skis” vendue 1 802 780 euros en 2019.

Notons qu’une table basse en loupe d’amboine et galuchat a été attribuée à 278 937 euros au mois de mai. Une commode Dubly s’est vendue 116 290 euros en 2019.

Les luminaires

Peu de luminaires ont été vendus en salle de vente ces dernières années.

Certains modèles démarrent autour de 500 euros pour des bougeoirs ou un petit plafonnier.

Les lampes de table ont trouvé acquéreurs entre 9 000 euros et 32 000 euros pour un modèle en bronze.

Un lampadaire Boa s’est vendu 50 000 euros en 2017.

Le dernier record de vente est un luminaire en bronze avec un socle en marbre d’époque édité par la Manufacture Nationale de Sèvres attribué à 149 074 euros fin 2020.

Les objets et les tapisseries

Les petits miroirs se vendent entre 900 euros et 35 000 euros.

Les vases s’estiment entre 1 000 et 15 000 euros selon le modèle.

On observe un grand écart de prix selon le modèle de la tapisserie.

Ainsi les prix démarrent à 2 800 euros et peuvent s’envoler jusqu’à 304 900 euros.

 

Sources :
CAMARD Florence, Ruhlmann, Editions du Regard, 1983
Ruhlmann, un génie de l’Art déco : Musée des Années 30 de Boulogne-Billancourt, [15 novembre 2001 – 17 mars 2002] : Musée des Beaux-Arts de Montréal, [2003], Somogy, Editions d’Art
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