Zao WOU-KI

thumb-blog

1921-2013

Peintre et Graveur Chinois

Retour sur un artiste au destin exceptionnel, un artiste universel

Très précoce, Zao Wou-Ki commence à dessiner et à peindre vers l’âge de 10 ans et pratique assidûment la calligraphie.

De sa formation classique et académique à l’École des Beaux-Arts de Hangzhou, il souhaite rapidement s’émanciper et tend déjà vers l’Occident en s’imprégnant de loin des grands maîtres : Pablo Picasso, Henri Matisse, Amedeo Modigliani, Paul Cézanne ou Auguste Renoir. Il se sent très proche de la démarche de Paul Cézanne et Henri Matisse en particulier.

II vit en Chine jusqu’à l’âge de 28 ans et en 1948, il part pour la France, emportant avec lui l’héritage artistique de son pays et embrassant les nouvelles inspirations de l’Occident. Zao Wou-Ki doit alors louvoyer au milieu d’écueils périlleux : rester amarré à son passé ancestral et occulter l’énergie bouillonnante de l’art européen ou noyer ses racines dans les flots artistiques occidentaux. Paul Klee sera l’allié qui lui permettra de garder son identité propre et son âme artistique.

Très vite, il s’immerge dans le milieu artistique parisien, particulièrement attiré par l’impressionnisme. Il compte parmi ses amis bon nombre des plus grands artistes internationaux, tels que Pierre Soulages ou Joan Miró. Au contact de l’Occident, il se dirigera progressivement vers l’abstraction lyrique. Ses peintures sont indéfinissables, de paradoxes et de nuances qui « confèrent à l’œuvre une vibrante densité, vision autant que résurgence, secret autant qu’illumination » (Daniel Marchesseau, historien de l’art).

Il jouit très vite d’une renommée internationale et il est mis à l’honneur dans de nombreuses expositions aussi bien en Europe qu’aux États-Unis. La Chine reconnaîtra son talent plus tardivement, au début des années 80. Son empreinte artistique est immense, il produit de nombreuses peintures à l’huile, encres de Chine, lavis, lithographies originales, lithographies dans des livres d’artistes, eau-forte et aquatinte, estampes, céramiques, et même des vitraux. À sa mort en 2013, son héritage est considérable et aujourd’hui présent dans de nombreux musées aux quatre coins du monde : la Tate Gallery de Londres, la Fondation Miró à Barcelone, l’Asian Art Museum de San Francisco, la Fondation Van Gogh à Arles, etc.

Expertise et estimation des œuvres de Zao Wou-Ki

Ce peintre chinois, ayant été naturalisé français dans les années 60, a cultivé un lien intime avec la France et bon nombre de ses œuvres ont donc investi notre territoire artistique.

Nous nous déplaçons dans toute la France pour estimer toute œuvre signée Zao Wou-Ki en votre possession. Nous vous soumettrons une expertise précise et fiable au prix du marché.

Barnie’s rachète comptant toutes peintures et productions artistiques de cet artiste majeur du XXe siècle.

En empruntant les codes de l’impressionnisme, Zao Wou-Ki joue sur les couleurs, mais aussi la lumière, et conserve toujours son univers fait de formes et de mirages. Sa superbe toile « Bateau Fond Bleu » invite au voyage et à la plénitude. À l’inverse, il sait donner fougue et joie à ses peintures, comme dans la très colorée peinture « Village en Fête » qui fait découvrir les mondes secrets de son imagination.

Œuvres réalisées par Zao Wou-Ki

Peinture

Lithographie

Zao Wou-Ki, l’artiste franco-chinois à la dimension internationale 

Expositions

  • 1946, exposition au Musée Cernuschi, Paris, France
  • 1955, exposition au Musée des Beaux-Arts, Cincinnati, États-Unis
  • 1966, exposition à la Maison de la culture, Caen, France
  • 1968, exposition Musée d’Art moderne, San Francisco, États-Unis.
  • 1974, exposition Maison des arts et des loisirs, Sochaux, France
  • 1975, exposition, Delta International Art Center, Beyrouth, Liban
  • 1978, exposition des estampes de Zao Wou-Ki, Hôtel de Ville et Bibliothèque municipale, Châteauroux, France
  • 1980, exposition au Palais des Beaux-Arts, Charleroi, Belgique
  • 1980, exposition au Musée de l’État, Luxembourg, Luxembourg
  • 1981, exposition au Grand Palais, Paris, France. Exposition itinérante dans plusieurs musées au Japon
  • 1982, exposition à la Bibliothèque nationale, Vichy, France
  • 1983, exposition au Musée des Beaux-Arts, Pékin, Chine et à l’Académie de peinture de Hangzhou
  • 1983, exposition au Musée national d’Histoire, Taipei, Taïwan. Exposition itinérante, maison de la culture de Tai-Nang, et Bibliothèque préfectorale de Tai-Chung
  • 1985, exposition à la Maison de la culture, La Rochelle, France
  • 1999, exposition « Zao Wou-Ki, les 20 dernières années de peinture », Centre d’Art, Royan, France
  • 2007, exposition « Zao Wou-Ki », Musée-Château de Nemours, France
  • 2012, exposition « Zao Wou-Ki, Le printemps du pinceau », Musée des Beaux-Arts, Rouen, France
  • 2015, exposition au Musée d’Art de Pully, Suisse
  • 2018, exposition « L’espace est silence », Musée d’Art moderne, Paris, France
  • 2021, exposition « Il ne fait jamais nuit », Hôtel de Caumont – Centre d’art, Aix-en-Provence, France

trospectives

  • 1954, rétrospective musée Cincinnati, États-Unis
  • 1964, rétrospective, Institut de technologie du Massachusetts, États-Unis
  • 1965, rétrospective, Museum Folkwang, Essen, Allemagne
  • 1969, rétrospective, Musée d’Art contemporain, Montréal, Canada
  • 1970, rétrospective, Palais des Beaux-Arts, Charleroi, Belgique
  • 1983, rétrospective, Musée Ingres, Montauban, France
  • 1992, rétrospective, Fondation Calouste-Gulbenkian, Lisbonne, Portugal
  • 1993, rétrospective, Taipei Fine Arts Museum, Taïwan
  • 1994, rétrospective, Centre culturel des Arts contemporains, Mexico, Mexique
  • 1996, rétrospective, Kaohsiung Museum of Fine Arts à Taïwan et au Hong Kong Museum of Art
  • 1996, « Zao Wou-Ki – A Retrospective », Musée d’Art moderne, Hong Kong, Chine
  • 1998, rétrospective, « Rétrospective de l’œuvre peinte et encres de Chine de 1979 à 1995 », musée des Beaux-Arts, Angers, France
  • 1998, rétrospective « Rétrospective Zao Wou-Ki, 60 ans de peintures », musée des Beaux-Arts de Shanghai, puis Pékin et Hangzhou
  • 2001, rétrospective, Musée d’Ixelles, Belgique
  • 2003, rétrospective, Galerie nationale du Jeu de Paume, Paris, France
  • 2004, rétrospective au Musée Fabre, Montpellier, France. Rétrospective itinérante au Lieu d’Art et Action Contemporaine de Dunkerque, au musée Fabre à Montpellier, au Bridgestone Museum à Tokyo et à l’Espace Bellevue à Biarritz
  • 2008, rétrospective, Bibliothèque nationale de France, Paris, France. Reprise au Suzhou Museum en Chine
  • 2013, rétrospective, Pinacothèque communale, Locarno, Suisse

Musées

  • Musée d’Art moderne, Paris, France
  • Grand Palais, Paris, France
  • Centre Georges-Pompidou, Paris, France
  • Centre culturel Noroit, Arras, France
  • Musée Ingres, Montauban, France
  • Musée Bertrand, Châteauroux, France
  • Musée National du Luxembourg, Luxembourg
  • Musée d’Art moderne, San Francisco, États-Unis
  • Musée Carnegie, Pittsburgh, États-Unis
  • Musée Solomon R. Guggenheim, New York, États-Unis
  • Musée Fogg Art, Cambridge, États-Unis
  • Université d’Harvard, États-Unis
  • Musée Herbert F. Johnson, Ithaca, États-Unis
  • Musée Hirshhorn, Washington, États-Unis
  • L’Institut d’Art, Chicago, États-Unis
  • Musée des Beaux-Arts, Montréal, Canada
  • Musée national des Beaux-Arts, Québec, Canada
  • Musée national d’Art moderne, Osaka, Canada
  • Musée de Shanghai, Chine
  • Musée national de Chine, Pékin, Chine
  • Musée national du Palais, Taipei, Taïwan.
  • Musée des Beaux-Arts de Kaohsiung, Taïwan
  • Musée d’Art moderne, Rio de Janeiro, Brésil

Fondations

  • Fondation Zao Wou-Ki, Genève, Suisse
  • Fondation Veranneman, Kruishoutem, Belgique
  • Fondation Pierre Gianadda, Martigny, Suisse
  • Fondation Vasarely, Aix-en-Provence, France

Les principaux livres sur Zao Wou-Ki

  • ABADIE Daniel, Zao Wou-Ki, éd. Hacker Art Books, 1988, 124 p.
  • COLLECTIF, Zao Wou-Ki, 1935-2010, éd. Flammarion, 2017, 400 p.
  • COLLECTIF, Zao Wou-Ki, éd. Paris musées, 2018, 64 p.
  • COLLECTIF, Zao Wou-Ki : Catalogue raisonné des peintures volume 1 (1935-1958), éd. Flammarion, 2019, 343 p.
  • COLLECTIF, Zao Wou-Ki collectionneur : L’homme des deux rives, éd. Flammarion, 2016, 293 p.
  • CHALUMEAU Jean-Luc, Zao Wou-Ki, éd. Cercle d’Art, 2001, 63 p.
  • CHAR René, Zao Wou-Ki, effilage du sac de jute, éd. Gallimard, 2011, 128 p.
  • CHENG François, Zao Wou-Ki, éd. Jeu De Paume, 2003, 241 p.
  • DAIX Pierre, Zao Wou-Ki, éd. Ides et Calendes, 2013, 128 p.
  • DELAY Florence, ABADIE Daniel, Zao Wou-Ki : Peintures et encres de Chine 1948-2005, éd. Hazan, 2015, 160 p.
  • DE VILLEPIN Dominique, Zao Wou-Ki et les poètes, éd. Albin Michel, 2015, 264 p.
  • DUQUERROY Marion, Zao Wou-Ki : L’espace est silence, Beaux-Arts éditions, 2018, 66 p.
  • FRÈCHES José, Zao Wou-Ki. Œuvres, écrits, entretiens, éd. Hazan, 2007, 160 p.
  • JACOMETTI Nesto, L’Œuvre gravé 1949-1954 de Zao Wou-Ki, Catalogue raisonné, éd. Gutekunst & Klipstein, 1955, 86 p.
  • LAUDE Jean, Zao Wou-Ki, éd. La connaissance, 1974, 120 p.
  • LEYMARIE Jean, Zao Wou-Ki, éd. Hier et Demain, 1978, 332 p.
  • MARCHESSEAU Daniel, MARQUET Françoise, et HENDGEN Yann, Zao Wou-Ki : Peintures, œuvres sur papier, céramiques, Somogy éditions d’art, 2007, 95 p.
  • MARQUET Françoise, Zao Wou-Ki, Les Estampes 1937-1974, 1975, 160 p.
  • MICHAUX Henri, Zao Wou-Ki, éd. Cercle d’Art,
  • NOËL Bernard , Zao Wou-Ki, éd. Cercle d’Art, 2000, 143 p.
  • NOËL Bernard, Zao Wou-ki : encres, éd. Seguier, 1989
  • ROY Claude, Zao Wou-Ki, éd. Georges Fall, 1970, 116 p.
  • TEXIER Richard, Zao, éd. Gallimard, 2018, 160 p.
  • VALLIER Dora et AGERUP Jorgen, Zao Wou-Ki : The Graphic Work, A Catalogue Raisonne 1937-1995, éd. Heede & Moestrup, 1994
  • VERGAHEN Éric, Zao Wou-Ki – Encres et Aquarelles, éd. Kamel Mennour, 2019, 144 p.

Biographie complète : Zao Wou-Ki, le maître de l’abstraction lyrique

Du 1er juin 2018 au 6 janvier 2019, le musée d’Art moderne de Paris a consacré une exposition au maître franco-chinois Zao Wou-Ki, l’occasion de revenir sur un parcours artistique exceptionnel à l’aube du centenaire de sa naissance.

Les débuts artistiques de Zao Wou-Ki, entre tradition chinoise et modernité européenne

T’chao Wou-Ki (devenu Zao Wou-Ki à son arrivée en France) est né en 1920, à Pékin. Entouré de ses six frères et sœurs, de sa mère et de son père, banquier, il grandit à Nantung, une petite ville près de Shanghaï. Zao Wou-Ki est l’un des descendants de la dynastie des Song (Xè-XIIIè apr. J.-C.) et admire déjà les peintures de Mi Fu (peintre chinois du XIe siècle) dont ses parents exposent un paysage lors des grandes occasions. Il dira à propos de ce peintre qu’il est « un peintre qui regarde autrement (…) ».

Élève doué et attentif, le jeune Zao Wou-Ki s’intéresse dès l’âge de dix ans au dessin et à la peinture qu’il pratique. Si son père, amateur d’art l’encourage dans cette voie, sa mère est plus réticente, mais ne s’oppose pas à son inscription à l’école des Beaux-arts de Hangzhou à l’âge de 14 ans. Il y étudie le dessin d’après un plâtre, d’après modèle, mais aussi la peinture à l’huile et la peinture traditionnelle chinoise.

Très tôt, le jeune artiste bouscule les codes de la peinture académique qui lui est enseignée, par ses professeurs, dont certains ont été formés à l’école des Beaux-arts de Paris, et dont les modèles sont Puvis de Chavannes ou encore Meissonnier. Tenaillé entre la tradition de la peinture chinoise et l’Académisme qu’il rejette, Zao Wou-Ki a besoin d’expérimenter le réel par d’autres moyens.

Il trouve dans les peintres modernes français comme Paul Cézanne, Matisse ou encore Pablo Picasso, la vision d’un art libéré des contraintes et plus proche de la nature. Il exerce son art sur le modèle des cartes postales rapportées par son oncle de ses voyages à Paris ainsi que des revues américaines diffusées en Chine comme Vogue.

En 1941, Zao Wou-Ki organise une exposition au musée national d’Histoire naturelle de Tchoung-King. Il y présente les œuvres de quelques-uns de ses contemporains chinois, ainsi que quelques-unes de ses œuvres. Détachées de la tradition, les toiles exposées insufflent une vague de modernité dans le paysage artistique chinois.

En 1946, Zao Wou-Ki revient à Hangzhou lorsque l’école des Beaux-arts déménage dans ses anciens locaux après que la Chine, occupée par le Japon jusqu’alors, redevienne libre. Zao Wou-Ki, guidé par la liberté de création et d’esprit qui a toujours été la sienne décide de partir pour la France, avec sa femme Lan-Lan.

Zao Wou-Ki, construction d’un artiste à la renommée internationale

Le 1er avril 1947, Zao Wou-Ki arrive à Paris. Il passe alors le plus clair de son temps au Louvre, et après quelques semaines y trouve un atelier, voisin de celui d’Alberto Giacometti. Là, l’artiste trouve enfin sa voie, dans le pays des impressionnistes qu’il admire tant. Zao Wou-Ki fait la connaissance d’artistes français comme Pierre Soulages et Hans Hartung, et immigrés comme Nicolas de Staël.

En 1949, Zao Wou-Ki est récompensé d’un premier prix à un concours dessin et croise à nouveau le chemin de Vadime Elisseeff, alors conservateur du musée Cernuschi, rencontré en Chine quelques années auparavant. Impressionné par le travail du peintre, il expose une vingtaine de ses huiles sur toile au musée Cernuschi.

En 1950, Pierre Loeb, amateur d’art et galeriste visite l’atelier de Zao Wou-Ki et lui propose de s’associer, après lui avoir acheté une quinzaine de toiles. Cette collaboration durera sept ans.

Les années 1950 marquent aussi la découverte et le développement de l’art de la lithographie pour l’artiste. Réalisées à l’imprimerie Desjobert, elles sont regroupées en albums, tantôt suivis des poèmes d’Henri Michaux, tantôt pour illustrer des textes.

En 1951, Zao Wou-Ki part en Suisse et découvre l’œuvre de Paul Klee, qui bouleversera sa propre création. Zao Wou-Ki apprend et comprend la peinture européenne d’une manière différente via le prisme de cet artiste influencé par l’art chinois.

Passionné de voyage, l’artiste emprunte de nombreux itinéraires à travers le monde. Il peint peu pendant ces périodes de découverte, mais continue de s’enrichir et de parfaire son savoir artistique. Il visite l’Italie et s’imprègne des grands chefs-d’œuvre de la Renaissance.

En 1952, Zao Wou-Ki est exposé à Paris et dans les grandes villes américaines comme Chicago, Washington et New York. C’est le début de la gloire. L’écrivain et poète Henri Michaux, devenu son ami, écrit les préfaces de ses catalogues d’exposition.

Son art ne s’exprime pas que sur une toile : Zao Wou-Ki réalise en 1953 le décor pour les Ballets de Paris de Roland Petit, et notamment La perle.

Zao Wou-Ki, entre désaveu et renouveau artistique

L’art de Zao Wou-Ki bascule vers 1953, lorsque, le reconnaissant lui-même il tend « vers une écriture imaginaire, indéchiffrable ». Les amateurs ne le suivent plus et très vite, l’investissement de Pierre Loeb est réduit à néant. Malgré le désaveu des amateurs français, Zao Wou-Ki continue d’être un artiste reconnu outre-Atlantique. La première rétrospective de son œuvre a lieu au musée Cincinnati en 1954.

En 1957, l’artiste part pour un voyage autour du monde qui le mènera notamment aux États-Unis et plus précisément à New York. Il y fait la connaissance de Samuel Kootz, un marchand de tableaux, et rend visite à des artistes de l’École de New York avec qui il tissera des liens d’amitié. La spontanéité et la liberté de création de la peinture américaine deviennent des modèles à suivre.

Poursuivant son périple dans les grandes villes des États-Unis aux côtés du couple Soulages, Zao Wou-Ki forme son œil à une expression artistique jusqu’alors inconnue dans les musées d’Art moderne.

Visitant le Japon, il y fait la rencontre de sa deuxième épouse Chan May-Kam. De retour de ses voyages, Zao Wou-Ki collabore avec le marchand d’art Samuel Kootz, ainsi qu’avec la Galerie de France, mettant en avant « l’abstraction lyrique » de l’artiste.

En 1959, Zao Wou-Ki décide de déménager son atelier rue Jonquoy dans un entrepôt aménagé. Lieu isolé du monde extérieur, son atelier est conçu presque comme un espace de recueillement, où il est toujours seul.

En 1957, une première biographie de l’artiste est écrite par son ami et collectionneur Claude Roy. Les hommages se multiplient et Jean-Michel Meurice, artiste-peintre et documentariste, réalise un film sur la vie et l’œuvre de Zao Wou-Ki.

En 1964, Zao Wou-Ki obtient la nationalité française, grâce au soutien d’André Malraux, alors ministre de la Culture. L’artiste continue de produire des lithographies, notamment pour illustrer les ouvrages d’André Malraux, comme son livre intitulé La tentation de l’Occident, paru en 1926. Plus tard, Zao Wou-Ki illustrera des poèmes comme ceux de Jean Lescure ou d’Arthur Rimbaud.

C’est à cette époque, que Zao Wou-Ki se plonge dans le travail, délaissant un temps sa soif de découverte et d’ailleurs.

Mais très vite, son succès l’amène à voyager de nouveau, notamment en Europe du Nord où il découvre les expositions sur Brueghel, Vermeer et Rembrandt. L’année suivante, ses voyages se poursuivent à un rythme effréné, du Canada aux États-Unis, il passe également au Mexique pour découvrir les sites archéologiques.

C’est à partir 1971 que Zao Wou-Ki s’intéresse de plus en plus à la réalisation d’encres de Chine. Cette technique, délaissée jusqu’à présent par l’artiste, prend une importance certaine dans sa création depuis que sa femme, May, est tombée malade. Elle décède l’année suivante.

Le retour aux sources de l’artiste franco-chinois

Zao Wou-Ki décide de partir pour quelques mois dans le pays qu’il a quitté près de 25 ans auparavant. S’en suivront deux nouveaux voyages, toujours auprès de sa famille, en 1974 puis en 1975. Zao Wou-Ki a toujours été inspiré par la peinture traditionnelle chinoise et aide à l’exposition en 1975 de peintures de paysage chinois à la Biennale de Paris au Palais Galliera. Tout comme l’Europe l’a influencé au cours de sa création, il estime que l’art traditionnel est un pan important de son vécu et de sa création, qu’il faut mettre en valeur et que les Européens doivent pouvoir découvrir.

Zao Wou-Ki retrouve goût à la création en 1973, lorsqu’il réalise de très grands formats, exposés dans les galeries parisiennes. Mais très vite, la santé fragile de sa mère le pousse à retourner en Chine auprès des siens.

Il poursuit sa production d’estampes et de grands formats à un rythme soutenu. Ses huiles sur toile connaissent un succès sans précédent et ravissent le monde de l’art par sa modernité et sa technique. C’est à cette période de sa vie qu’il réalise sa peinture intitulée « Hommage à André Malraux ». Ce triptyque de plus de 5 mètres de long est une parfaite illustration du génie créatif de Zao Wou-Ki.

L’artiste continue d’illustrer des textes et des livres et connait un succès sans faille, avec des expositions qui se tiennent en France et dans le monde, notamment en 1975 au Liban et plus précisément à Beyrouth au Delta International Art Center.

En 1975, avec sa femme, Françoise Marquet, rencontrée quatre ans plus tôt, Zao Wou-Ki poursuit ses voyages à New York puis à Rome avec leur ami Jean Leymarie, alors directeur de la Villa Médicis. D’une curiosité sans faille, Zao Wou-Ki admire une fois de plus, et avec un recul plus important, les œuvres des artistes de la Renaissance, mais également les tableaux de Nicolas Poussin présentés à une exposition qui lui est consacrée.

En 1978 se déroule une grande exposition des estampes de Zao Wou-Ki à Châteauroux. Cet évènement révèle l’intérêt du grand public pour l’artiste, et les critiques encensent les chefs-d’œuvre exposés.

Les expositions se multiplient et le succès est au rendez-vous. Au sommet de sa gloire, Zao Wou-Ki décide de faire don à la Bibliothèque nationale de France d’œuvres gravées, présentées lors d’une exposition en 1979.

Toujours proche de la classe politique, Zao Wou-Ki réalise en 1979 des dessins à l’aquarelle et à l’encre de Chine, pour la Manufacture nationale de Sèvres, commandée par le ministre de la Culture et de la Communication, Jean-Philippe Lecat.

En 1980, une nouvelle commande de l’État permet de renouveler son art. Il doit réaliser une très grande fresque pour un édifice scolaire. Zao Wou-Ki réalise les neuf panneaux de cette fresque qui fait l’admiration des amateurs. Suite à cet exploit, il est nommé professeur de peinture murale à l’école nationale supérieure des Arts décoratifs.

En 1981, Zao Wou-Ki expose pour la première fois et de façon individuelle ses œuvres dans un musée français : les galeries nationales du Grand Palais. L’exposition est un franc succès et deviendra itinérante dans différents musées au Japon, notamment à Fukutoa et Hong Kong.

Après être allé aux vernissages de ces différentes expositions, il poursuit son voyage en Asie dans les grandes villes chinoises, accompagné de sa femme, qui découvre avec émerveillement la culture de son mari.

Zao Wou-Ki continue de réaliser des toiles de très grandes dimensions ainsi que des fresques, notamment pour l’architecte et néanmoins ami de l’artiste, I. M. Pei, pour son hôtel des Collines parfumées, inauguré près de Pékin en 1982.

En 1983, des expositions lui sont consacrées notamment en Asie à Taipei, capitale de Taïwan, ainsi qu’à Tai-Nang et Tai-Chung. Puis en France, avec une rétrospective consacrée à l’artiste au musée Ingres de Montauban.

Exposé pour la première fois dans son pays d’origine, Zao Wou-Ki ne cache pas sa joie auprès du ministre de la Culture chinois qui, en retour, ne tarit pas d’éloge sur le peintre. Zao Wou-Ki est exposé au musée national de Pékin et à l’Académie de peinture de Hangzhou où s’est pour la première fois exprimé son talent près de 50 ans plus tôt.

 Zao Wou-Ki, entre honneurs et hommages

À presque 60 ans, Zao Wou-Ki se lance dans un nouveau projet sans précédent : réaliser une mosaïque de 10 mètres de long pour un lycée de Mitry-Mory dans le département de Seine-et-Marne.

Promu officier de la Légion d’honneur par le ministre de la Culture, M. Jack Lang, Zao Wou-Ki poursuit l’exposition de ses œuvres à Paris et en Suisse, puis à la Maison de la culture de La Rochelle.

En 1985, Zao Wou-Ki est appelé à la demande de son ancienne école à Hangzhou où il dispense des cours de peinture et de dessin au fusain, à des professeurs et élèves venus de toutes les meilleures écoles d’Art de Chine.

En 1993, le président de la République française, François Mitterrand, promeut Zao Wou-Ki commandeur de l’ordre de la Légion d’honneur et les hommages se multiplient sous la forme de rétrospectives au Japon, au Mexique et à Taïwan.

À la fin des années 1990, Zao Wou-Ki accompagne plusieurs fois le président de la République française, Jacques Chirac, en voyages officiels et notamment en Chine.

En 2002, l’œuvre et la carrière de Zao Wou-Ki sont consacrées puisqu’il est élu à l’Académie des Beaux-arts, et nommé grand officier de l’ordre de la Légion d’honneur. En 2003, une rétrospective de l’œuvre de l’artiste à la galerie nationale du Jeu de Paume est visitée par plus de 135 000 personnes, un record.

En 2008, une grande rétrospective lui est consacrée à la Bibliothèque nationale de France à Paris. Cet évènement sonne la consécration de son art et paradoxalement aussi, la fin de sa production d’huiles sur toile et ses dernières aquarelles l’année suivante.

Il poursuit ses recherches et ses créations autour du vitrail, avec notamment une réalisation pour le réfectoire du prieuré de Saint-Cosme, dans les Vosges.

Cette figure marquante de l’art contemporain franco-chinois s’éteint à l’âge de 93 ans et est enterrée au cimetière du Montparnasse à Paris. L’œuvre de l’artiste franco-chinois, présente dans tous les grands musées d’Arts moderne et contemporain du monde, est aujourd’hui d’une valeur inestimable.

Zao Wou-Ki et l’encre de Chine

Maître des « masses de lumière et d’ombre », Zao Wou-Ki développe dans sa technique de dessin à l’encre sur papier, l’expression d’une abstraction infinie.

La technique de l’encre de Chine a toujours été d’utilisation aisée pour Zao Wou-Ki, qui s’est mis à en produire de plus en plus, quitte à délaisser l’huile sur toile, lorsque sa femme, May est tombée malade dans les années 1970.

L’inspiration mûrie de la tradition

Très jeune, Zao Wou-Ki est imprégné des traditions et de la culture chinoise, notamment par son père qui lui apprend la calligraphie. Plus tard, lors de ses études à l’école des Beaux-arts de Hangzhou, il étudie le dessin et la peinture chinoise traditionnelle.

Rejetant les modèles établis d’une tradition multiséculaire, le jeune artiste s’intéressera de nouveau aux arts traditionnels chinois et notamment à la réalisation d’œuvre à l’encre de Chine dans les années 1970.

Il dit à ce propos « Si je trace un signe, il est toujours limité par le signe, mais la liberté doit jouer : c’est là qu’est la difficulté : car tout en s’exprimant très librement, il y a toujours une tradition et une éducation qui te retiennent. L’encre de Chine est le résultat de ces composantes et il n’y a pas de mensonge possible. »

L’artiste travaille en réserve, c’est-à-dire qu’il laisse apparaitre le papier, pour mettre en valeur les tâches qui apparaissent au premier plan de l’œuvre. Ces œuvres sont d’une bichromie intense, avec des effets grisâtres selon la densité de l’encre de Chine sur la surface de la toile. Cette mise en valeur du contraste entre le noir et le blanc n’est pas sans rappeler « l’outrenoir » de Pierre Soulages.

Les outils de la création

Zao Wou-Ki aimait rappeler la simplicité de la création d’une œuvre réalisée à l’encre de Chine sur papier. Il suffit simplement d’utiliser un flacon d’encre de Chine, du papier et des pinceaux permettant de tracer des traits et des formes expressives aussi légères que possible.

Pour réaliser ses œuvres, Zao Wou-Ki se sert de plusieurs dizaines de pinceaux, qui peuvent surprendre par leur largeur. Les pinceaux traditionnels tels qu’utilisés se terminent tous par une pointe en poils, qu’il faut effiler et lisser.

L’attention portée aux matériaux utilisés est d’une importance primordiale selon Zao Wou-Ki, qui utilise un papier de grande qualité. Importé d’Asie et notamment de Chine et du Japon. Le papier est fabriqué dans une tradition chère à l’artiste. Les papiers peuvent être d’un blanc immaculé, mais aussi délicatement gris ou jaune, qui donnent tout autant de profondeur à son expression.

Le paradoxe de la création

Les repentirs, propres à la peinture à l’huile sont ici bannis. Les réalisations à l’encre de Chine sont des œuvres qui mettent en exergue un paradoxe : la technique employée est celle de la spontanéité, mais également de la justesse et du refus de l’approximation. Zao Wou-Ki a ainsi déchiré et laissé dans un coin de son atelier des centaines de dessins, jugés trop médiocres selon lui.

Animées d’une complexité et d’une réflexion sans faille, les encres de Chine de Zao Wou-Ki sont à opposer à la création spontanée qui anime l’art contemporain de l’époque. Issu de la tradition, son art ne saurait sacrifier l’abstraction à un manque de réflexion probant.

Le jeu de matière et de contraste entre l’ombre et la lumière de ses encres est le fruit de nombreuses recherches et d’années de maîtrise de cette technique. Chaque trait, chaque coulure, chaque signe s’inscrivent dans un art global empreint de modernité.

Au-delà de la signification

Mais alors, qu’est-ce que ces encres de Chine sur papier donnent-elles à voir ? Rien et tout à la fois. Zao Wou-Ki n’a pas pour ambition de moderniser la peinture de paysage, et si chacun peut déduire des taches d’encre, une mer agitée ou un arbre, ceci n’est pas de la volonté de l’artiste. Il serait vain de chercher une quelconque représentation figurée dans ses œuvres.

Zao Wou-Ki, dans une interview donnée par sa dernière épouse, Françoise Marquet, s’exprime en ces termes lorsqu’elle lui pose la question de la référence à la nature et à la réalité dans ses encres de Chine : « En tout les cas, il n’y a pas de référence parce que je l’ignore. (…) L’essentiel est de créer un espace propre. » N’en déplaise donc, aucune explication iconographique ou référence ne vient perturber l’œuvre de l’artiste.

Si Zao Wou-Ki emprunte à la tradition chinoise des paysages à l’encre, les réserves et la technique, la comparaison s’arrête là. Les encres de Chine réalisées par Zao Wou-Ki sont des œuvres inclassables, ni issues de l’expressionnisme abstrait, pas plus que du courant moderne ou de la grande tradition chinoise dans son ensemble.

Ces taches d’encre ont permis de suggérer à l’infini, sans jamais pouvoir être définie précisément, et c’est peut-être là le génie d’un grand artiste.